[EXPOS] 08 au 29.07 – Charlie Jeffery / Dieudonné Cartier & Jean-Baptiste Carobolante – Galerie Florence Loewy Paris

[EXPOS] 08 au 29.07 – Charlie Jeffery / Dieudonné Cartier & Jean-Baptiste Carobolante – Galerie Florence Loewy Paris

Expositions du 08 au 29.07 de Charlie Jeffery côté gallery et de Dieudonné Cartier & Jean-Baptiste Carobolante côté Books à la Galerie Florence Loewy, Paris.

Vernissage des expositions le 8 juillet de 17h à 21h

Côté Gallery : Projection Vidéo Smiling / Shouting de Charlie Jeffery


« L’immense domaine de la performance

Smiling et Shouting sont deux performances filmées, réalisées à la toute fin du 20e siècle. Le grain du film super 8 de Smiling, sorte d’autoportrait de l’artiste, inscrit cette image dans un passé définitif, et en tout cas décisif, dont le message subliminal pourrait bien être : « Charlie, artiste du futur 21e siècle, souris, tu es filmé. A toi l’immense territoire de la performance à réinventer après Vito, Marina, Chris, Herman et les autres actionnistes du glorieux et catastrophique 20e siècle ». De fait, l’artiste décide de montrer ces deux films aujourd’hui pour la première fois comme un diptyque inaugural et fondamental pour tout le travail qu’il a développé depuis bientôt vingt ans, déjouant constamment la possible réduction de l’art à la mise en forme de produits catégorisables.
D’un côté donc, Charlie Jeffery sourit à tout prix à l’image, de manière volontaire, volontariste même, embarrassant et désarmant.
De l’autre, Charlie Jeffery entre dans le cadre, se place, crie, se reprend, crie de plus belle, se reprend, crie et re-crie puissamment, trépigne, saute, mouline des bras, tombe se relève – toute cette agitation corporelle constituant une dynamo à cri –, se reprend encore, et de nouveau crie, crie, crie à tue-tête, avec plus de rage puis bientôt avec un certain abandon. L’alternance entre l’action de se ressaisir et celle de crier se poursuit jusqu’à ce que l’artiste-performer considère que l’action est accomplie, qu’il n’y a plus d’énergie, le regard caméra final signifiant cela : Voilà c’est tout. Et l’acteur, ou l’actionneur, quitte le champ de vision.
L’idée de défoulement nous vient à l’esprit. Mais le défoulement ici est une production d’énergie à la faveur de ce que l’artiste découvre en improvisant un premier cri. L’énergie dégagée n’était pas « emmagasinée », elle s’est créée. Le moment de la performance est une création continuée, trouvant ses propres ressources, persévérant dans le temps pour Smiling, ou se construisant et se structurant à mesure pour Shouting : de longues plages de silence, concentrées, re-centrées, y alternent avec les cris, de plus en plus spectaculaires, impliquant, convoquant et mobilisant graduellement tout le corps, libérant ces actions de leurs significations sociales, comme l’hypocrisie, ou plus généralement la sociabilité forcée, ou l’hystérie, ou encore le handicap social.
Ces alternances bien tranchées entre la profération subite et intense des cris, faisant entrer le corps en convulsion, et les moments d’apaisement soudain, frappant par leur neutralité affective, leur impassibilité, évoquent le registre théâtral et le paradoxe du comédien. Le comédien est celui qui est capable de changer de but en blanc d’émotion ou d’aspect, capable d’éprouver et d’exprimer une émotion sincèrement grâce à un nécessaire détachement, qui est alors capable de s’époumoner, comme pris d’une fureur inextinguible, puis de s’interrompre d’un coup, recouvrant brusquement son calme. Rompant avec une certaine tradition de la performance irréconciliable, radicale et extrême qui rejette le théâtre, Charlie Jeffery joue avec les codes théâtraux et la théâtralité, de l’emportement et du détachement, du grave et du dérisoire, de l’engagement total et de la distanciation. Il ouvrait ainsi une perspective d’exploration et d’expérimentation en se mettant en jeu corporellement, physiquement, certes, mais à la recherche d’une voie singulière, alternative, convaincu qu’il lui fallait définir ses actions dans une optique anti-héroïque bien que son implication dût être totale.
D’un côté donc, une action infime, somme toute discrète mais tenace, en apparence anodine mais en réalité essentielle s’agissant de savoir ou percevoir ce qui nous définit en tant qu’être humain, et de l’autre côté, une action grandiloquente, furieuse, théâtrale, lyrique, extravagante. L’alpha et l’oméga de la performance. Ses limites inférieures et supérieures. Et entre ces deux limites, le vaste champ de la performance, et ses infinies variations. Le champ que ces deux limites définissent demeure en effet infini. La chute définitive, celle qui est unique, pourrait bien être la seule borne à ce si vaste champ d’actions. » Mériam Korichi

 Côté Books : Documents #Neptune (Publication) The office of gravitational de Dieudonné Cartier & Jean-Baptiste Carobolante

Le projet Neptune est né d’un constat simple : l’ontologie de l’artiste n’a cessé de se métamorphoser durant le XXème siècle pour arriver aujourd’hui à un rapport de plus en plus flou avec le libéralisme global. Il nous semble qu’une vieille image archaïque perdure dans nos représentations et nous pousse à l’immobilisme conceptuel : celle de l’artiste mélancolique. Walter Benjamin, dans son « Origine du drame baroque allemand », en a dressé le portrait à l’aide de la figure mythologique de Saturne, planète des rêveurs et des neurasthéniques.
Arpentant le monde de l’art, nous cherchons Saturne mais n’en trouvons que son motif. Il nous arrive parfois de chantonner une élégie mais cela n’a rien à voir avec les pratiques que nous mettons en œuvre ou qui nous font face. L’art a-t-il seulement été une seule fois l’affaire de mélancolie ? L’artiste nous semble entreprendre des choses bien plus vastes, scrutant l’abîme pour mieux y déceler des étincelles de gloire plutôt qu’une noirceur de plomb.
The Office of Gravitationnal Documents accueille cette recherche en son sein afin de la mettre en tension autour d’une constellation d’images se conceptualisant à l’approche de la planète Neptune, astre des intensifications, astre bleu, astre de ceux qui en veulent plus. Dans le prolongement de ces interrogations artistiques propres à la mise en place de processus de recherche autour des questions relatives au travail, au document et à l’histoire de l’art, The Office of Gravitationnal Documents s’est armé de tout son savoir faire afin de donner vie à cette interrogation. Elle prit alors forme lors de deux expositions à Bruxelles, entre octobre 2016 et avril 2017, aux galeries monCHERI et Deborah Bowmann. D’une vague bleue faite de bois à un bureau sur moquette grise, le livre The Office of Gravitationnal Documents #Neptune est à la fois le compte rendu et l’objectif atteint par ces deux évènements.
Une fois cet objet remis entre vos mains, nous espérons qu’il vous sera doux de lever la tête afin de contempler les étoiles qui nous observent. Le regard chargé d’une lueur bleutée, vous vous engagerez au sein du monde et de son amoncellement d’œuvres. Peut-être, lors de mondanité, vous abandonnerez-vous à une plainte ou à une larme mais qu’importe, nous saurons tous ici de quelle intensité est faite votre cœur et à quelle valeur s’accroche votre volonté.

Galerie Florence Loewy
9—11 rue de Thorigny Paris 03