[EXPO] 27.04 au 17.06 -Mehdi-Georges Lahlou – OF THE CONFUSED MEMORY – Galerie Rabouan Moussion Paris

[EXPO] 27.04 au 17.06 -Mehdi-Georges Lahlou – OF THE CONFUSED MEMORY – Galerie Rabouan Moussion Paris

Exposition personnelle OF THE CONFUSED MEMORY de MEHDI-GEORGES LAHLOU du 27 avril – 17 juin à la Galerie Rabouan Moussion, Paris

Vernissage 27 avril 2017

« S’il nous faut parler des origines de Mehdi-Georges Lahlou, c’est qu’elles sont au cœur de son travail. Cet artiste franco-marocain joue à détisser sa généalogie afin d’en souligner le métissage, et le fait avec ruse. Ses racines marocaines l’influencent quant au choix des thèmes qu’il aborde, des matériaux et des motifs qu’il emploie. Il s’amuse à brouiller les codes en associant des figures qui évoquent la piété, qu’elle soit catholique ou musulmane : vierges à l’enfant en moucharabiehs, prie-Dieu, vitraux de soldats maghrébins, … Dans une plus large mesure, il interroge sur la pérennité des cultes et des cultures, voué-e-s à disparaître mais qui subsistent grâce aux œuvres qui demeurent, comme autant de traces et de signes nous permettant de les concevoir en esprit.

Porté au début de sa création par les gender studies et poussant jusqu’aux limites son propre corps lors de performances, il élargit aujourd’hui cette problématique à la déconstruction des stéréotypes culturels qui l’ont porté. Mehdi-Georges, dont le prénom composé est déjà le signe d’une identité culturelle double, se positionne à la fois comme modèle et comme sujet d’étude, déclinant son image au travers d’une multiplicité de bustes. Jouant avec les codes parfois jusqu’au cliché – pois-chiches, graines de couscous et tajines comme matériaux de prédilection – Mehdi-Georges Lahlou place le spectateur à son tour dans une position de regard ambigüe, le questionnant sur ses propres attendus quant au contexte bipolaire qui émerge, entre Orient et Occident, féminin et masculin, catholique et musulman. Par là-même, l’artiste induit un questionnement plus général sur la construction culturelle du stéréotype, cette opinion toute faite, acceptée sans réflexion ni sens critique et qui détermine ses manières de penser, de sentir et d’agir.

Mais le choix de ces matériaux si particuliers, des denrées somme toute souvent périssables, renvoie également à la question de la pérennité de son œuvre et à travers elle, celle de nos cultures. Car en effet, à l’image de la statuaire grecque qui nourrît la Renaissance, il reste à trouver ce qui nous survivra, quelles seront les marques qui résisteront au temps de l’Histoire. Des stigmates de la guerre de 14-18 portées par les Zouaves algériens et les divisions armées marocaines, il reste des souvenirs familiaux et quelques clichés photographiques. Que saurait-on de nos origines si les œuvres auxquelles nous nous référons n’avaient pas traversé les âges ? » Alice Cazaux

« Quand on observe l’ensemble de l’oeuvre réalisé à ce jour par Mehdi-Georges Lahlou, trois constantes principales, parmi d’autres, se dessinent : l’une concerne son rapport au corps, l’autre son rapport à l’espace. On peut même affirmer qu’assez souvent, les deux sont entremêlées. Sa relation au corps n’est évidemment pas étrangère à sa formation initiale de danseur, celle à l’espace à son travail de « sculpteur », terme sans doute le plus adéquat pour parler de sa démarche artistique, même si la photographie – et là on touche au troisième point : la question de la mémoire – n’en est jamais absente non plus.

Corps, espace, mémoire, donc, forment une sorte de trilogie dont au moins deux des composantes se retrouvent dans chacune des performances, des sculptures ou des images produites par l’artiste. Toutes concourent, chacune à leur manière, à une évocation détournée de références culturelles, de convictions religieuses ou d’attributs sociaux. Il s’agit pour lui de toutes les revisiter à l’aulne des pratiques critiques et des différents processus caractéristiques de l’art contemporain, dans une de ses fonctions qui consiste à remettre perpétuellement en question certains tabous et autres convictions de nos sociétés, qu’ils soient d’ordre moral, religieux, philosophique, politique, social, culturel ou esthétique.

On pourrait presque affirmer que l’ambiguïté des résultats auxquels aboutit Mehdi-Georges Lahlou est inversement proportionnelle aux moyens qu’il se donne, moyens somme toute relativement traditionnels pour un artiste du XXIe siècle, à la croisée des cultures, des genres, des styles et des techniques. De tout temps en effet, les artistes ont pratiqué aussi bien l’autoportrait que la sculpture, le vitrail a traversé les siècles, et dès ses origines en 1839, la photographie n’a cessé d’être utilisée par les artistes, qu’ils soient peintres ou non.

Alors, d’où vient cette faculté que possède Mehdi-Georges Lahlou à produire des oeuvres ambiguës avec des éléments qui, eux, ne le sont pas vraiment ? On ne peut parler de surréalisme dans sa démarche, mais plutôt d’une capacité à dissocier les référents de toutes sortes et de toutes origines pour en faire des amalgames des formes de la pensée. On verrait donc plus l’artiste en un alchimiste agissant sur les images, les matières et les supports pour établir de nouvelles perceptions de ceux-ci, c’est-à-dire pour transformer leur identité en produisant des objets ou des figures inclassables, car multiréférentiels.

De ce point de vue, les bustes aux visages parfois dupliqués, les structures cubiques en forme de Kaaba, renvoient à différents aspects de l’histoire de l’art (autoportrait, art minimal) dont ils détournent les codes de représentation. Il s’agit également de conjuguer des pièces, soit en les multipliant (72 Vierges – 2012), soit en les associant. L’artiste crée ainsi de nouvelles oeuvres à partir d’autres plus anciennes, les plaçant en un équilibre aussi improbable qu’évocateur (Équilibre à la Kaaba – 2013), ou encore en jouant des effets d’inclusion, comme dans Home sweet home (2009-2010), structure minimaliste en forme de Kaaba, dont une des faces est transformée en écran vidéo. L’ensemble pourrait être résumé par le titre d’une autre oeuvre qualifiée d’installation, et paradoxalement dénommée Construction cubique, ou de la pensée confuse (2011).

C’est en se faisant catapulter entre elles ces différentes formes et figures, sans que cela soit pourtant évident au premier abord, que l’artiste parvient à élaborer un univers particulier. Il lui est propre, mais tout un chacun dispose de la faculté de se l’approprier, dans la mesure où ses composantes ne nous sont pas étrangères, au contraire, elles pourraient presque nous paraître familières. Il ne reste plus au spectateur qu’à recomposer le puzzle en tentant de débroussailler la pensée tentaculaire de l’artiste. » Bernard Marcelis (extrait du texte ‘Des dispositifs d’une pensée hybride’)

Galerie Rabouan Moussion
11 rue Pastourelle, Paris 3
www.rabouanmoussion.com

La galerie participe participe à Choices 2017.

Visuel : Mehdi-Georges Lahlou, LA CONFERENCE DES OISEAUX (2017) (exposition OF THE CONFUSED MEMORY – Galerie Rabouan Moussion Paris)